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15, rue Soufflot - 75005 Paris
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L’exercice du métier de journaliste implique les libertés fondamentales, telles que la liberté de la presse, une des bases de la démocratie (en ce sens : Conseil constitutionnel, décision des 10 et 11 octobre 1984, n° 84-181), la liberté d’opinion et la liberté d’expression (articles 10 et 11 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, article 19 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948, article 10 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales (CEDH)). Compte tenu des garanties constitutionnelles entourant l’exercice de la profession de journaliste, un statut social propre à cette profession est apparu rapidement nécessaire.

  • Absence de définition légale de la profession
  • Assimilations légales aux journalistes
  • Présomption de salariat
  • Frais et moyens matériels
  • Obligations déontologiques
  • Carte professionnelle
  • Licenciement et indemnisation spécifique
  • Clause de conscience
  • Sur les droits d’auteur des journalistes (renvoi)

Absence de définition légale de la profession

La profession de journaliste n’est pas définie légalement. L’activité de journaliste relève avant tout d’une situation de fait. C’est pourquoi, l’alinéa 1er de l’article L. 761-2 du Code du travail pose les critères d’exercice professionnel. La loi confère la qualité de journaliste à « celui qui a pour occupation principale, régulière et rétribuée l’exercice de sa profession« , la réunion de ces trois conditions étant indispensable à la reconnaissance de la qualité de journaliste.

Ainsi doivent être considérés comme journalistes salariés, le dessinateur qui, moyennant rémunération, fournit régulièrement des dessins à une entreprise de presse ou bien encore le maquettiste-secrétaire, collaborateur direct de la rédaction.

Dans ces conditions, le journaliste pigiste bénéficie du statut de journaliste professionnel permanent lorsque l’entreprise de presse lui fournit régulièrement du travail pendant une longue période. Le journaliste, même s’il était rémunéré à la pige, devient un collaborateur régulier et, à ce titre, doit bénéficier des avantages prévus en faveur des journalistes professionnels permanents, par la convention collective nationale des journalistes (Cassation, ch. sociale, 3 mars 2004, n° 02-40372). La rémunération à la pige ne saurait donc exclure le journaliste professionnel du bénéfice de la participation et de l’intéressement. Une circulaire du 28 juillet 1950 du Ministre du Travail définit la pige comme « un mode de rémunération des articles, dessins ou photographies insérés par une entreprise de presse ou d’édition. La pige règle une fourniture. Elle est calculée en fonction de la qualité ou de l’importance de cette fourniture. Le pigiste est le journaliste ou assimilé, titulaire de la carte professionnelle, dont la collaboration assidue ou occasionnelle avec une entreprise de presse ou d’édition est rémunérée à la pige« . Le pigiste, journaliste professionnel, n’est pas payé au temps mais à la tâche. A contrario, un journaliste qui n’est pas rémunéré à la tâche n’a pas la qualité de pigiste mais celle de journaliste professionnel permanent (Cassation, ch. sociale 26 janvier 2000, n° 97-45.583). La rémunération forfaitaire est due dès lors que le travail a été commandé ou accepté, indépendamment de la publication ou non de l’article. Afin d’éviter une confusion, les entreprises de presse ont recours à la lettre d’attente par laquelle elles indiquent au journaliste pigiste que l’accord définitif sur l’article n’a pas encore été donné par le rédacteur en chef. L’employeur qui entend renverser la présomption de salariat à l’égard d’un journaliste pigiste devra rechercher dans le mode d’exercice de l’activité journalistique et dans le degré d’indépendance dont l’intéressé dispose dans l’organisation de son travail que ce dernier n’est pas lié à lui par un lien de subordination.

Dans un premier temps, la Cour de cassation jugea que le critère du lien avec l’actualité n’était pas requis pour la reconnaissance de la qualité de journaliste. Mais, au milieu des années 80, elle a admis la nécessité de démontrer un lien d’actualité en vue de la reconnaissance du statut de journaliste. La Cour de cassation a jugé ainsi « que les reporters-dessinateurs [sont journalistes s’ils] ont pour occupation (…) l’exécution de documents dessinés, inspirés de l’actualité (…) » (Cassation, ch. sociale, 4 juin 1987). Sur ce même fondement, elle dénie la qualité de journaliste à ceux dont l’activité consiste en la fourniture de jeux sans rapport avec l’information ou l’actualité. D’une manière identique, le Conseil d’État accorde la qualité de journaliste professionnel à ceux déployant une activité en lien avec l’actualité (Conseil d’Etat, 6e ch. et 2e ss-sect., 24 oct. 1997).

Assimilations légales aux journalistes

La loi assimile à l’activité journalistique celles des correspondants, des rédacteurs et des reporters. Le correspondant est défini par la circulaire du 28 juillet 1950 comme « un informateur permanent ou occasionnel au service de l’entreprise de presse dans un centre géographique déterminé ou dans un milieu social particulier« . Le correspondant se distingue du correspondant local de presse, travailleur indépendant, qui contribue, selon le déroulement de l’actualité, à la collecte d’informations de proximité relatives à une zone géographique déterminée ou à une activité sociale particulière pour le compte d’une société éditrice. Les métiers de rédacteur et dereporter visés par la loi sont les rédacteurs-traducteurs, les sténographes-rédacteurs, les rédacteurs-dessinateurs, les reporters-dessinateurs, les reporters-photographes. Toutefois, cette liste, qui résulte de la loi de 1935, est aujourd’hui très insuffisante puisqu’elle ignore les métiers de l’audiovisuel. Pour se voir attribuer la qualité de journaliste, le collaborateur de la rédaction doit démontrer que son activité constitue un mode de diffusion de l’information, un travail intellectuel, soit de recherche, soit de rédaction ou de mise en forme de l’information.

Présomption de salariat

L’article L. 761-2, alinéa 4, du Code du travail énonce que « toute convention par laquelle l’entreprise de presse s’assure, moyennant rémunération, le concours d’un journaliste professionnel (…) est présumée être le contrat de travail. Cette présomption subsiste quels que soient le mode et le montant de la rémunération ainsi que la qualification donnée à la convention par les parties« . Ainsi, le journaliste est par principe salarié, titulaire d’un contrat de travail, et par exception travailleur indépendant. Cette présomption subsiste quels que soient le mode et le montant de la rémunération, ainsi que la qualification donnée à la convention par les parties.

En revanche, sera considéré comme travailleur indépendant celui qui agit dans un état de totale indépendance, non seulement en choisissant les sujets qu’il traite et les modalités pour les traiter mais surtout en ne recevant aucune directive ni aucune commande. Il en est ainsi notamment pour le photographe-reporter qui a la maîtrise totale de ses conditions de travail, ne se voit imposer ni programme ni lieu de travail, utilise les services de ses propres collaborateurs qu’il rétribue lui-même, détermine ses propres méthodes de travail, et facture comme tels à l’éditeur les travaux techniques qu’il exécute, ou bien encore lorsque, en l’absence de commande, l’auteur fait parvenir, de sa propre initiative, ses travaux, sans instruction de la société de presse.

Frais et moyens matériels

La Cour d’appel de Bourges a décidé récemment que l’entreprise de presse est tenue de fournir au salarié les moyens matériels nécessaires à la prestation de travail, même si le salarié, journaliste, reporter-photographe pigiste, a un autre employeur dès lors que le contrat de travail ne comporte pas de clause concernant une éventuelle participation de l’employeur aux frais. En l’espèce, l’employeur a donc été condamné à indemniser le salarié pour l’utilisation et l’entretien par ce dernier de ses appareils photographiques personnels (Cour d’appel de Bourges, Ch. soc., 13 oct. 2006).

Obligations déontologiques

La profession de journaliste n’est pas placée sous la tutelle d’un ordre professionnel. Cependant, le journaliste doit se soumettre à des règles déontologiques (cf. Charte des devoirs professionnels des journalistes français rédigée en 1918 et modifiée en 1939 ; Déclaration des devoirs et des droits du journaliste de 1971 ; article 1er, alinéa 3, et article 3B de la Convention collective nationale des journalistes du 27 octobre 1987).

Carte professionnelle

La carte d’identité professionnelle des journalistes est délivrée dans les conditions fixées par la Commission de la carte d’identité des journalistes professionnels. En cas de refus de délivrance de la carte, un recours est possible devant la Commission supérieure. L’obtention de la carte professionnelle ne préjuge en rien de la qualité de journaliste. Elle n’est d’ailleurs pas visée par l’article L 761-2 qui définit la profession de journaliste. Toutefois, en pratique, l’absence de carte professionnelle peut entraver l’exercice de la profession de journaliste, la plupart des avantages sociaux et fiscaux étant subordonnée à la production de la carte. De plus, la présentation de la carte professionnelle est impérative, par exemple, pour l’établissement d’un passeport. En outre, la Convention collective nationale des journalistes interdit à toute entreprise d’employer pendant plus de trois mois des journalistes professionnels et assimilés qui ne seraient pas titulaires de la carte professionnelle de l’année en cours ou pour lesquels cette carte n’aurait pas été demandée.

Licenciement et indemnisation spécifique

L’existence du statut des journalistes s’illustre avec la question de l’indemnisation de licenciement. Tout d’abord, la faute grave n’exclut pas l’octroi d’une indemnité. Ensuite, l’évaluation de l’indemnité relève d’une Commission arbitrale des journalistes et son montant ne peut être inférieur à un mois de salaire par année d’ancienneté professionnelle.

Clause de conscience

Une autre spécificité essentielle du statut réside dans la faculté pour le journaliste de rompre unilatéralement son contrat de travail au nom de son droit moral, et ce dans trois hypothèses visées par l’article L. 761-7 du Code du travail :

– la cession du journal ou du périodique,
– le changement notable dans le caractère ou l’orientation du périodique,
– et la cessation définitive de parution de la publication.

Le journaliste est en droit de ne pas poursuivre son activité dans un cadre qui ne serait plus en accord avec ses convictions. L’exercice de la clause de conscience se concrétise par la démission de l’intéressé, entraînant la rupture de son contrat de travail tout en pouvant percevoir une indemnité de licenciement.

La notion de cession du journal au sens de l’article L. 761-7 du Code du travail doit être jugée par référence au droit des sociétés, au droit fiscal et à la loi sur la presse. Une opération patrimoniale doit nécessairement exister. Par conséquent, les seuls changements intervenant dans les organes de direction ou d’administration, y compris dans les directions techniques (direction de la publication), ne constituent pas une cession. Lorsque le mouvement ne porte que sur une partie très limitée du capital, la cession n’existe, en principe, pas non plus. À l’inverse, la cession d’un bloc de contrôle peut être assimilée à un transfert.

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